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Mme Siradiou Assiatou Bah Diallo: Hommage à un combattant de la Liberté

Publié par Alphabim On vendredi, juin 05, 2009

L’intervention de Mme Siradiou rédactrice en chef du magazine panafricain AMINA au symposium organisé au Palais du peuple de Conakry, lors des funérailles nationales du Doyen Ba Mamadou, est citée en exemple. Nous vous proposons l’intégralité de son témoignage sur la vie et l’œuvre du grand disparu. Exclusif !

Madame la Première Dame, Chère Mariam, veuve du combattant de la Liberté, ma nouvelle compagne de route sur le chemin de la Croix, Chère Famille Chers compatriotes et ami.

Nous voilà tous réunis ce matin pour dire adieu à Koto Mamadou Bah. Je le savais malade, mais je refusais de croire à la nouvelle de son décès. Un déni devenu habitude chez moi, comme si j’ai définitivement immortalisé tous ceux que j’aime…

Longtemps j’ai cru que mon mari était en voyage, et chaque fois que le téléphone sonnait, je me précipitais pensant que c’était lui.

Avec Koto Mamadou, le connaissant, je me demandais si ce n’était pas une farce… Peut-être voulait-il seulement mesurer la place qu’il occupe dans nos cœurs.

Car comme nous savons tous, même à 79 ans, il a gardé une jeunesse de cœur et d’esprit, ce côté enfant gâté qui le rendait si attachant à mes yeux.

Rien ne l’ébranle, il sait prendre les choses au sérieux sans trop se prendre au sérieux. Pour avoir parcouru le monde, il relativisait tout et ne dramatisait rien. Taquin, il avait toujours le mot pour rire, et savait même rire de lui. Une autodérision, preuve d’intelligence et de finesse d’esprit.

Depuis l’annonce de sa disparition, seule dans l’obscurité de la nuit, à l’heure où tous les démons se réveillent, je me surprends à le supplier « Koto, s’il te plaît, reviens maintenant ! On arrête de jouer…!»

Mais la tristesse que je lis sur vos augustes visages, à ce grand rendez-vous du donner et du recevoir où il brille par son absence, n’augurent rien de bon…

Dois-je me résoudre à l’idée que tu es parti pour ne plus revenir… ?

Nous savons que le doyen est joueur, mais il n’est pas homme à faire faux bond aux amis...

Voyez-vous, partir n’est pas gênant en soi. C’est le mot toujours qui brouille nos esprits, et plombe l’horizon. Alors disons que tu es juste passé de l’autre côté de la pièce. Nous ne te voyons pas, certes, mais tu n’es pas loin.

C’est pourquoi en ces instants solennels, je m’adresse directement à toi.

Prends ma main dans la tienne cher Koto, et écoute ce que j’ai à te dire…

Au moment où tu t’apprêtes à rejoindre ta dernière demeure, je viens te dire adieu avec ces milliers d’hommes et de femmes ici présents.

Saches que nous t’aimions.

Vois-tu, la sagesse populaire dit que ce sont les vivants qui ferment les yeux des morts, mais ce sont les morts qui ouvrent les yeux des vivants.

Maintenant je sais pourquoi on pleure les êtres chers qui nous quittent pour rejoindre l’au-delà. Tout simplement parce que nous n’avons pas pu leur dire à temps à quel point ils étaient importants pour nous.

Alors s’il vous plait, chers compatriotes, n’attendons pas qu’il soit trop tard pour chanter les louanges de nos bien-aimés, et manifester notre affection, nourriture de l’âme.

Je me souviens encore, comme si c’était hier. C’est dans ce même palais du peuple, aujourd’hui relooké, que tu étais monté au créneau, pour rendre hommage à mon mari Siradiou qui venait de tirer sa révérence.

Qui aurait pu imaginer que cinq ans après, tu lui emboiterais le pas ?

A mon tour maintenant, grand frère de te retourner le compliment. Que c’est dur de parler de toi au passé… ! comme si tu n’as jamais existé !

Que veux-tu ?, la vie comme disait ce grand philosophe est ainsi faite, tu as beau faire, elle se termine toujours mal.

La loi est la même pour tout le monde, car sur la balance du Bon Dieu, l’éléphant et le moucheron pèsent le même poids. Les pauvres mortels que nous sommes pourront toujours multiplier les gesticulations rien n’y fait, la mort frappe quand elle veut, où elle veut, qui, elle veut…

Grand frère en nous quittant, tu laisses un grand vide.

L’époux, le père, le frère, l’oncle, le cousin, l’ami, le leader politique que tu fus, a marqué son temps.

Dans cette vie, il y a ceux qui passent et ceux qui vous marquent à jamais. Tu fus de ceux-là, personne ne peut le contester.

Comme Siradiou, Koto Mamadou appartient à la Guinée entière, l’Afrique et le monde. C’est dire que chacun de nous héberge un Mamadou Bah en lui, car nous sommes tous des êtres à multiples facettes.

Le Mamadou Bah que je pleure aujourd’hui est certainement différent de celui de mon voisin.

Pour ma part, je t’ai vu la première fois en 1958, lors du mariage de Bappa Mountaga, et yayé Asmaou dont je salue la présence dans cette salle. J’étais demoiselle d’honneur parmi d’autres cousines, et Siradiou Diallo mon futur mari, mon garçon d’honneur.

Certes, tu ne peux t’en souvenir parce que j’étais une jeune adolescente, et toi, tu faisais partie des invités de marque, venus apporter une touche de modernité et de savoir vivre à Labé. A l’époque, une ville culturelle réputée pour ses jolies filles, et qui pendant les vacances attirait toute l’intelligentsia guinéenne. Tu étais beau comme un dieu, et toutes les filles mobilisées pour servir, voulaient savoir : qui était ce beau parleur qui allie charme et élégance ? Comme tout fini par se savoir, on apprit que le prince charmant ne venait pas du désert sur son cheval blanc. C’était bel et bien un guinéen, originaire de Dinguiraye. Une ville sainte qu’on appelle par dérision Ding-city. Leurs cousins de plaisanterie disent que les habitants savent que Dieu les a créés, mais ils demeurent convaincus qu’ils ont créé le reste du monde.

Alors, tu m’as demandé une fourchette. Une fourchette ? Où vais-je lui trouver une fourchette ? Là où presque tout le monde mange à la main. C’était déjà compliqué de trouver des cuillères pour tous les invités…. ? Autant demander la lune !

Et voilà qu’à cause d’une fourchette, tu perdais ton royaume, car à ton insu, on t’avait sacré roi !!!

Mais passons. Je croyais en avoir fini avec toi, mais j’ignorais encore que nos destins allaient se croiser de nouveau. Dans le rôle du hasard, ta sœur Aissatou Bah a fait irruption dans ma vie au lycée de jeunes filles de Conakry. Et depuis, on ne s’est jamais plus quittés. Dans la même foulée, j’appris que ma tante Nima, l’épouse de Bappa Mamadou Sow, l’un de mes oncles préférés était ta sœur. Beaucoup plus t ard, ton neveu Madani Maréga épousait ma jeune tante, Fatima…Nos familles étaient plus que jamais liées.

Mieux en novembre 1962, nous étions douze filles à bénéficier des bourses d’études offertes par les Etats-Unis. Tu nous avais précédées de deux ans à Washington en qualité de fonctionnaire à la Banque Mondiale.

J’habitais à un jet de pierres de l’immeuble que tu occupais. Benjamin Edouard qui fut Ministre sous le régime de Conté, et Alpha dit De Gaulle, le fils aîné de Yacine Diallo, étaient tes voisins dans ce même bâtiment.

Certains Weekends, on passait nos après-midis à faire des plans sur la comète.

Aissatou t’avait placé sur un piédestal. A mon tour, je t’ai tressé une couronne. Donc c’est tout naturellement que je me suis confiée à toi, lorsque j’ai décidé de quitter Washington pour aller épouser Siradiou le 6 janvier 1968 à Paris.

A l’époque déjà, Siradiou était condamné à mort par contumace pour ses activités politiques contre le régime de Sékou Touré. Mais jamais tu n’es passé par Paris sans nous faire signe.

En grand frère attentionné, tu as tenu à t’assurer que Siradiou avait un emploi bien rémunéré avant de donner ta bénédiction.

Une foule d’anecdotes remontent à ma mémoire. Tu savais toujours te montrer drôle, cultivé, brillant. Je ne parlerai pas de ta générosité de cœur, celle qui fait l’étoffe d’un chef.

En 1990, je te retrouve cette fois en Guinée où tu t’étais rendu célèbre par tes publications sur la situation politique guinéenne.

Je peux te dire koto, que Siradiou et toi avez fait ce que vous aviez à faire, reçu ce que vous deviez recevoir, donner ce que vous aviez à donner, et le tout dans le respect, le sens de l’autre, la loyauté dans le combat et la lutte pour la démocratie.

Aux oiseaux de mauvais augure, j’avais coutume de dire, au risque de paraître prétentieuse que, dans cette lutte pour le changement, je suis toujours gagnante, parce que d’un côté j’ai mon mari, de l’autre mon frère.

Vous n’avez certes pas occupé de fauteuil présidentiel. Peu importe ! Vous n’avez pas lutté que pour ça.

Et puis, après tout, un objectif n’est pas fixé pour être atteint, mais pour servir de point de mire.

L’essentiel est que vous avez marqué l’histoire de ce pays par votre courage, votre détermination, votre abnégation…, concrétisés par la fusion de l’UNR de Mamadou Bah, le RNP d’Aliou V, et le PRP de Siradiou Diallo. Personne ici ne l’a oublié. Je n’en veux pour preuve que la marée humaine qui a accueilli hier à l’aéroport ta dépouille mortelle, et les funérailles grandioses organisées pour l’occasion.

Aux présidentielles de 1998, Siradiou Diallo s’est désisté en faveur de son grand frère Bah Mamadou. Mieux, il s’est offert d’être le Directeur de campagne. Et lorsque mon mari a souhaité que je sois du voyage, je n’ai pas hésité un instant, j’ai pris mon avion.

Mais il fallait s’attendre au tripatouillage électoral habituel. Un des préfets avait cyniquement prévenu : « Mr Diallo, nous savons que vous avez les populations avec vous, mais nous, nous avons nos bics et du papier ! ».

Les journalistes parlent trop, me disait mon père.

Mais Koto, laisse-moi te dire ce que tu sais déjà.

Ce qui compte, ce n’est pas tellement ce que Siradiou et toi avez donné, au point d’y laisser votre vie, c’est ce qui est reçu qui compte.

Or, le peuple de Guinée vous est éternellement reconnaissant, il le témoigne au quotidien.

Les médailles de l’Ordre National du Mérite qui vous sont décernées sont les preuves de cette reconnaissance.

Merci au Président Dadis et à son équipe d’avoir pris la peine de revisiter l’histoire de notre pays et de récompenser le Mérite.

Koto Mamadou, tu nous quittes pour rejoindre ceux tu aimes, mais sachez Siradiou et toi, que vous ne laissez pas que des orphelins. Vos pairs veillent au grain et à la pérennisation du processus qu’ensemble vous avez initié. Nous leur faisons confiance pour immortaliser l’œuvre commune.

Au nom de tous ceux qui vous ont connu et aimé, je remercie le Seigneur de nous avoir donné la chance de vous connaître et de partager la vie des êtres, aussi merveilleux, que vous étiez.

Cher grand frère, avant de te laisser poursuivre ton destin et de reprendre le nôtre, je voudrai que tu passes le message à tous ceux qui nous ont précédés.

Tant que nous vivrons, vous ne mourrez pas car, vous continuerez à vivre dans nos cœurs.

Va mon frère dans ton nouveau royaume, va, va !

Tes parents et tous nos amis t’y attendent.

Adieu vieux frère, tu pourras dormir en paix, car tu as accompli ta mission sur terre.

Adieu guerrier infatigable !

N’oublie surtout pas de dire à Siradiou que je l’aimerai toujours.

Mme Assiatou Siradiou Bah Diallo

Source : Radio - Kankan


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